Voyages loin de ma chambre t.2. Dondel Du Faouëdic Noémie
châteaux historiques,
L’abbaye de Marmoutier, Savonnières
Les Jardins Mame
Le Parc de Beaujardin, La Colonie de Mettray
Coup d’œil sur la ville de Tours
Comme tu le vois, mon cher Henri, tantôt c’est l’extérieur qui étale d’admirables beautés, tantôt c’est l’intérieur somptueusement décoré, parfois ce sont les deux qui brillent d’un éclat incomparable.
Ici, le parc l’emporte sur le château par le pittoresque de sa situation: vue étendue et variée, sites enchanteurs, eaux vives, cascades tapageuses, pelouses veloutées, drapées de grandes corbeilles de fleurs ou incrustées de mosaï-culture d’une régularité parfaite. Là, le château qui se détache sur l’émeraude des vastes prairies, se mire dans la transparence des eaux ou s’abrite sous l’ombre épaisse des bois et domine par son aspect féodal et princier, par son architecture remarquable.
C’est aussi de la dentelle de pierre, pierre blanche plus facile à travailler, plus agréable à l’œil; mais qui ne vaut pas quand même celle des antiques clochers à jours et des vieux châteaux-forts de Bretagne, façonnés dans le granit. L’intérieur arrive à son tour avec ses meubles rares, ses collections précieuses, ses bibelots artistiques, ses tableaux de maîtres. Cependant je consignerai ici mon intime pensée. Plusieurs de ces beaux châteaux sont un peu le palais de la Belle au bois dormant, j’ai ressenti ce sentiment d’une manière très vive à Chenonceaux, ils ne sont point habités. Pas de maîtres et pas beaucoup plus de domestiques. Un portier qui reste dans sa loge, il faut bien quelqu’un pour répondre, et cependant il me souvient d’avoir un certain dimanche parcouru dans tous les sens un joli parc entourant un joli château auquel nous sonnâmes en vain, sans rencontrer âme qui vive. Le gardien, cette après-midi là, avait sans doute pris la clef des champs.
Lorsque vous êtes entré, un valet de chambre se présente pour vous faire visiter. En général les maîtres sont en voyage, c’est la phrase stéréotypée sur les lèvres des serviteurs; ils voyagent ou vivent ailleurs plus simplement que ne le comporterait leur propriété. Il est certain que pour mener le train considérable qu’exigent de pareils châteaux, il faudrait une fortune énorme, que tous leurs propriétaires n’ont pas.
Leurs châteaux sont des musées qu’ils respectent des trésors dont ils sont fiers à juste titre et qu’ils gardent précieusement, mais dont ils ne peuvent se servir.
Les magnifiques châteaux dont je viens de te parler en détail sont les gros diamants dont la Touraine est en partie l’écrin; mais que de perles précieuses, que de ravissants joyaux, ce bel écrin renferme encore! Dans ce fortuné pays, on peut dire que chaque bourgade, ville ou village, a son château qui le préserve de l’oubli par ses souvenirs historiques, ou l’embellit de sa propre beauté.
Je citerai: Beaumont-la-Ronce, ancien château seigneurial; le château de la Tourballière, tous les deux érigés en marquisat, le premier en 1757, le second en 1656.
Le château de Beugny qui s’enfonce dans la forêt de Chinon. Boussay qui détache son profil gothique au milieu des eaux. Dans ce château sont nées quatre illustrations de la famille de Merou: Jean, chambellan du roi (1363), Pierre, amiral de France (1416); Philippe, chambellan du roi Louis XI (1461); Jacques-François, président de l’Assemblée Nationale (1789), général de division, mort en 1810.
Le château de Brizay, qui appartenait jadis à la famille de Maillé, et fut alors le théâtre d’un évènement douloureux: tous ses habitants furent un jour ensevelis sous les plafonds qui s’écroulèrent à la fois. Simon de Maillé, archevêque de Tours, qui se trouvait dans une partie très élevée du château, survit seul à désastre.
Le très beau château de Commaire, construction moderne, appartenant au marquis de Lussac.
Le château de Grillemont, possédé par le fameux Tristan, et habité par Louis XI.
L’ancien château de Plessis-Rideau, que Gédéon Tallemant des Réaux acheta vers 1650, au prix de cent quinze livres, et auquel il donna le nom de château Réaux.
Le château de la Guerche, construit sous Charles VI, est fort curieux; situé sur les bords de la Creuse, il présente du côté de la rivière qui le baigne, une élévation de plus de cent pieds. On y voit six rangs de voûtes superposées. Les greniers sont au rez-de-chaussée du côté de la cour, et se composent de vastes pièces voûtées bien sèches, bien aérées, quoiqu’au niveau de la Creuse. Les murs à leur base ont cinq mètres d’épaisseur.
Le beau château de Chavigny, bâti dans le goût de la Renaissance. Le château d’Epigny, où naquit en 1717, le chevalier Pierre de Fontenailles, qui a laissé diverses poésies.
Le château de Montbazon situé sur une haute colline, construit au commencement du XIe siècle par Foulques Nerra. En 1459, Charles VII, tenant sa Cour dans le château de Montbazon, y reçut de François II l’hommage du duché de Bretagne.
Le château de la Bourdaisière où naquit Gabrielle d’Estrées en 1565.
Le château de la Vallière, d’où la famille de Baume-Le-Blanc avait pris son nom et qui rappelle tout à la fois la pieuse carmélite et les jours ensoleillés d’amour du grand roi.
Le vieux manoir de la Mothe-Sonzay, qui éveille l’attention des archéologues, fut construit par Henri II pour Diane de Poitiers.
Le château de Rochecotte, ancienne habitation et lieu de naissance du fameux chef vendéen Guillon, marquis de Rochecotte, condamné et fusillé en 1798, à la plaine de Grenelle, à Paris, à l’âge de vingt-neuf ans.
Un peu plus loin on remarque le château moderne de Saint-Patrice, appartenant à Monsieur le comte de Chabrol. Son parc renferme une épine miraculeuse qui commence sa floraison dans le mois de décembre et s’épanouit même sous la neige. La tradition populaire attribue ce phénomène végétal à saint Patrice qui jadis, après avoir traversé la Loire, planta son bâton en ce lieu. Ce bâton prit racine, devint buisson et se couvrit de fleurs. Depuis cette lointaine époque, le buisson qui repousse toujours, rappelle fidèlement chaque année le passage en ces lieux du patron de l’Irlande. Aussi les Irlandais qui visitent la Touraine ne manquent-ils jamais de faire ici un pieux pèlerinage.
Le majestueux château d’Ussé, qui, de son cadre de grands bois, domine le vaste bassin de la Loire. Ce château date de la première moitié du XVIe siècle. Il fut en partie construit par Vauban qui l’habita. Sa chapelle gothique est tout à fait charmante.
J’oublie certainement quelques vieux châteaux semés çà et là par Charles VII. Mais voici la Herpinière, une de ses maisons de plaisance, et Bonaventure, un pavillon élégant qu’il aimait et qu’il avait fait construire pour Agnès Sorel. Il venait souvent avec elle prendre le plaisir de la chasse à l’oiseau, dans les environs.
Le château de la Roche-Racan m’a fort intéressée. C’est là que naquit en 1589 et que mourut en 1670, âgé de quatre-vingt-un ans, le célèbre poète Honorat de Breuil, marquis de Racan, d’une des plus anciennes familles de Touraine. Le château de la Roche bâti à mi-côte et dont les murs ont quatre mètres d’épaisseur à la base, est remarquable aussi par une tour octogone d’où la vue s’étend sur une superbe vallée. Je comprends qu’en présence de cette belle campagne calme et recueillie, l’âme rêveuse du poète ait cherché dans la contemplation des beautés de la nature qui conduisent à Dieu, ses meilleures inspirations. Son esprit bercé, dans un rêve infini, a produit des odes sacrées tirées des psaumes et des poésies pastorales qui, si elles manquent de force, ont cependant donné à la langue poétique une harmonie et une grâce naturelles qu’on ne connaissait pas jusque là.
J’énumèrerai encore, entrevus à vol d’oiseau:
Le vieux château-fort de Montrésor, autrefois flanqué de tours et entouré de douves profondes.
Le château de Candé qui appartient à la famille Drake del Castillo.
Le