Robert Burns. Angellier Auguste

Robert Burns - Angellier Auguste


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goût d'une autre époque, et brochées d'une profusion d'or et d'argent que notre temps ne comporte plus. Chacun de ces accessoires accentue la date de ces poèmes, et les rejette plus loin de nous. Parfois, cet effet est produit par quelque motif naïf et tout fait. Quand un jeune homme enlève une jeune fille, il monte toujours un cheval gris pommelé, et elle, un cheval blanc comme lait65. Lorsque deux amants sont ensevelis l'un près de l'autre, il sort un églantier de la tombe de l'amant et un rosier de celle de la maîtresse.

      Lord William fut enseveli dans l'église de Ste-Marie,

      Lady Margaret dans le chœur de Ste-Marie;

      Hors de la tombe de la dame, poussa une rose rouge,

      Et hors de celle du chevalier poussa un églantier.

      Et tous deux se rencontrèrent et s'enlacèrent,

      Comme s'ils désiraient être près l'un de l'autre,

      De sorte que tout le monde put connaître clairement

      Qu'ils poussaient de deux amants qui s'étaient chéris66.

      C'est là un des détails qui reviennent constamment et appartiennent à tous les faiseurs de ballades. Presque toujours, il y a cette prodigalité de métaux et de pierres précieuses, qui indique qu'on est dans le rêve et qu'on puise à des coffres inépuisables. On sent que l'imagination se grise de richesses. Les chevaux sont ferrés d'argent aux pieds de devant, et ferrés d'or aux pieds de derrière; ils portent à la crinière des clochettes d'argent qui tintent à chaque pas67. Les jeunes filles lissent leurs cheveux avec des peignes d'argent. On étend des tapis de drap d'or du château à l'église, pour que la fiancée ne marche pas sur le sol68. De toutes parts, passent des cortèges de mariage, brillants, vêtus de cramoisi et de vert69; tous les cavaliers portent sur le poing un faucon; toutes les dames tiennent une guirlande70. Quoi de plus délicatement étincelant que cette description:

      Son palefroi était un gris pommelé,

      Je n'ai jamais vu son pareil;

      Comme brille le soleil un jour d'été,

      Cette belle dame elle-même brillait.

      Sa selle était d'ivoire pur,

      C'était une vue très belle à voir!

      Ornée et raide de pierres précieuses,

      Tout entourées de cramoisi.

      Des perles d'Orient, en grande quantité;

      Sa chevelure tombait autour de sa tête;

      Elle chevauchait sur la pelouse de fougères,

      Tantôt elle sonnait du cor, et tantôt chantait.

      Les sangles étaient de riche soie,

      Les boucles étaient de béryl,

      Ses étriers étaient de clair cristal,

      Et tout couverts de perles.

      Le poitrail était d'acier fin,

      La croupière était d'orfèvrerie,

      La bride était d'or fin,

      De chaque côté, trois clochettes pendaient.

      Elle conduisait en laisse trois lévriers,

      Et sept braques couraient à ses pieds;

      Je ne voulais pas me hâter de lui parler,

      Son front était blanc comme un cygne.

      Elle portait un cor pendu au col,

      Et au-dessous de sa taille mainte flèche,

      En vérité, mes seigneurs, comme je vous le dis,

      Ainsi était habillée cette belle dame71.

      Ou bien encore qu'on lise cette jolie peinture, qui transporte dans la fantaisie le fait très simple d'une maîtresse à la recherche de son amant.

      Oh! je vais chercher un charpentier,

      Pour me construire un navire,

      Et je chercherai de hardis matelots,

      Pour naviguer avec moi sur la mer…

      Son père lui fit construire un navire,

      Et le gréa très royalement;

      Les voiles étaient de soie vert pâle,

      Et les câbles de taffetas;

      Les mâts étaient faits d'or bruni,

      Et brillaient au loin sur la mer,

      Les bordages étaient richement incrustés

      De nacre et d'ivoire.

      À chaque amure qu'il y avait,

      Pendait une clochette d'argent

      Qui tintait doucement à la brise,

      Ou à la houle enflée de la mer salée72.

      Les fonds achèvent cette impression. On y aperçoit des paysages irréels. Parfois, ce sont des fabriques fantastiques. C'est, par-delà une mer courroucée, un château avec une haute tour au toit d'étain:

      Quand elle vit la tour majestueuse

      Luire claire et brillante,

      Qui se tenait au-dessus des vagues ouvertes,

      Bâtie sur un roc élevé73.

      Ou bien c'est la façade d'un château féodal:

      Il y a un beau château, bâti de chaux et de pierre,

      Oh! n'est-il pas bâti plaisamment?

      Sur le devant de ce beau château,

      Il y a deux unicornes beaux à voir74.

      Le plus souvent, comme dans les vieilles tapisseries, ce sont des verdures, des fonds de feuillage. Voici le verger où la reine des fées conduit Thomas d'Ercildoune:

      Elle le conduisit dans un beau verger,

      Où les fruits croissaient en grande abondance;

      Les poires et les pommes étaient mûres,

      La datte, et aussi le damas;

      La figue et aussi les grappes de la vigne;

      Les rossignols reposaient sur leurs nids,

      Les papegais drus commençaient à voler çà et là,

      Et la chanson des grives ne voulait pas cesser75.

      N'est-ce pas là vraiment un arrière-plan d'ancienne tenture aux frondaisons semées de fruits et d'oiseaux? Ce sont aussi des fonds de forêts, dans lesquelles passent des cerfs, des chasseurs vêtus de vert, l'arc à la main, suivis de leurs bons chiens gris.

      Johnie regarda vers l'est, et Johnie regarda vers l'ouest,

      Et un peu au-dessous du soleil;

      Et là il aperçut un cerf brun qui dormait,

      Sous un buisson de genêts.

      Johnie tira, et le cerf brun bondit,

      Et il le blessa au flanc,

      Et, entre l'étang et le bois,

      Ses chiens abattirent la bête fièreСкачать книгу


<p>65</p>

The Douglas Tragedy.

<p>66</p>

The Douglas Tragedy; Prince Robert; Fair Annet.

<p>67</p>

Lord Thomas and Fair Annet; Thomas of Yonderdale; Sweet Willie and Fair Annie.

<p>68</p>

Lord Ingram and Child Vyet.

<p>69</p>

Young Bekie.

<p>70</p>

Lord Ingram and Child Vyet.

<p>71</p>

Thomas of Ercildoune.

<p>72</p>

Fair Annie of Lochryan.

<p>73</p>

Fair Annie of Lochryan.

<p>74</p>

Song of the Outlaw Murray.

<p>75</p>

Thomas of Ercildoune.