Robert Burns. Angellier Auguste

Robert Burns - Angellier Auguste


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un penny32.

      Dans quelques-unes de ces ballades, le drame va jusqu'à l'atroce. Dans Edom de Gordon, le chef, qui a donné son nom à la ballade, se présente avec cinquante hommes devant le château de Towie, où la châtelaine est enfermée avec ses trois enfants. Il la somme de se rendre.

      Descendez vers moi, belle dame,

      Descendez vers moi, descendez vers moi;

      Cette nuit vous reposerez dans mes bras,

      Le matin, vous serez ma fiancée33.

      La mère refuse. Il fait mettre le feu au château. La flamme monte; la fumée étouffe les enfants qui se lamentent les uns après les autres; puis viennent les réponses désespérées de la mère. C'est là que se trouve cette scène à la fois touchante et affreuse.

      Oh, alors parla sa fille chérie,

      Elle était frêle et mignonne:

      «Oh! roulez-moi dans une paire de draps,

      Et descendez-moi par-dessus la muraille».

      Ils la roulèrent dans une paire de draps,

      Et la descendirent par-dessus la muraille,

      Mais, sur la pointe de la lance de Gordon,

      Elle fit une chute mortelle.

      Oh! jolie, jolie était sa bouche,

      Et rouges étaient ses joues,

      Et claire, claire était sa chevelure,

      Sur laquelle le sang rouge coule.

      Alors, avec sa lance il la retourna;

      Oh! que la face de l'enfant était pâle!

      Il dit: «Tu es la première que jamais

      »J'aie souhaité voir revivre».

      Il la tourna et la retourna,

      Oh! que la peau de l'enfant était blanche!

      «J'aurais pu épargner cette douce face

      Pour devenir les délices d'un homme.

      Alerte, partons, mes joyeux compagnons,

      Je pressens un triste destin.

      Je ne puis regarder cette douce figure

      Qui est là gisante dans l'herbe34».

      La flamme gagne la mère qui meurt en embrassant ses bébés. Son mari arrive, se met à la poursuite d'Edom de Gordon, et le massacre avec toute son escorte. Puis, revenant vers les masses brûlantes où est enseveli tout ce qu'il aime, il s'y précipite. Il ne reste dans cette scène de carnage que la jeune fille étendue sur l'herbe. Une autre ballade sur un sujet analogue, l'Incendie de Frendraught, est peut-être pire encore. Une troupe d'hommes, à qui on a donné l'hospitalité après une fausse réconciliation, est enfermée dans une tour à laquelle le feu est mis. Il y a un passage où un d'entre eux crie, à travers les barreaux de fer de la fenêtre, ses dernières recommandations, tandis que son corps est consumé, qui est une chose horrible.

      Je ne puis pas sauter, je ne puis pas sortir,

      Je ne puis arriver à toi,

      Ma tête est prise dans les barreaux de la fenêtre,

      Mes pieds brûlés se détachent de moi.

      Mes yeux bouillent dans ma tête,

      Ma chair aussi est rôtie,

      Mes entrailles bouillent avec mon sang,

      N'est-ce pas une horrible angoisse?

      Prends les bagues de mes doigts blancs,

      Qui sont si longs et étroits,

      Et donne-les à ma belle Dame,

      Là où elle est assise dans son château.

      Je ne puis pas sauter, je ne puis pas sortir,

      Je ne puis pas sauter vers toi,

      Ma partie terrestre est toute consumée,

      Ce n'est plus que mon âme qui te parle35.

      Ces atrocités justifient le jugement de Prescott: «Bien que les scènes des plus vieilles ballades soient empruntées au XIVe siècle, les mœurs qu'elles accusent ne sont pas supérieures à celles de nos sauvages de l'Amérique du Sud.36»

      À ces tueries d'armées ou de clans, à ces forfaits de bandes de brigands, s'ajoutent des drames de famille. Une marâtre empoisonne sa belle-fille37. Une femme tue son mari parce qu'il l'a insultée38. Un frère tue sa sœur parce qu'on ne lui a pas demandé son consentement pour son mariage39. Une fille d'Écosse est devenue enceinte d'un seigneur anglais; son père furieux la fait mettre sur un bûcher40. Une mère empoisonne son fils parce qu'il a épousé une femme contre son gré41. L'amour surtout, exaspérant ces vies violentes, les lance dans des aventures plus violentes encore. Les femmes ont l'énergie, les emportements de sentiments et d'actes, des mâles. Elles n'hésitent devant rien, ni devant les fatigues, ni devant les périls. Les enlèvements sont fréquents. Les amants s'enfuient à cheval; le père et les frères les poursuivent, les rattrapent; on s'arrête, on tire les épées, on se bat sur la bruyère.

      Les épées furent tirées des fourreaux,

      Et ils se précipitèrent au combat,

      Et rouge et rosé était le sang

      Qui coula sur le talus semé de lis42.

      Parfois l'amant triomphe laissant les frères étendus sur le sol.

      Il appuya son dos contre un chêne,

      Et assura ses pieds sur une pierre;

      Et il a combattu contre ces quinze hommes,

      Et il les a tués tous hormis un seul;

      Mais il a épargné le chevalier âgé

      Pour rapporter les nouvelles au château.

      Quand il eut rejoint sa belle dame,

      Je pense qu'il l'embrassa tendrement:

      «Tu es mon amour, je t'ai gagnée,

      Et nous parcourrons librement la forêt verte.»43

      Il arrive aussi que l'amant s'éloigne blessé mortellement. C'est le sujet de la plus célèbre et de la plus touchante de ces ballades, the Douglas Tragedy.

      Il la mit sur un cheval blanc comme lait,

      Et lui-même sur un cheval gris pommelé;

      Un cor de chasse pendait à son côté,

      Et ils s'éloignèrent, chevauchant légèrement.

      Lord William regardait par-dessus son épaule gauche,

      Il regardait pour voir ce qu'il pouvait voir;

      Et il aperçut le père et les frères hardis de sa bien-aimée,

      Qui accouraient à cheval sur la plaine.

      «Descends, descends, lady Margaret, dit-il,

      Et tiens mon cheval de ta main,

      Pendant que contre tes sept frères hardis

      Et


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<p>32</p>

Archie of Ca'field.

<p>33</p>

Edom o' Gordon.

<p>34</p>

Edom o' Gordon.

<p>35</p>

The Fire of Frendraught.

<p>36</p>

Prescott. Essais de Biographie et de Critique; l'article intitulé Les Chants de l'Écosse.

<p>37</p>

Lady Isabel.

<p>38</p>

The Lord of Waristoun.

<p>39</p>

The Cruel Brother.

<p>40</p>

Lady Maisry.

<p>41</p>

Prince Robert.

<p>42</p>

Katherine Janfarie.

<p>43</p>

Erlinton, the Bent sac Brown.