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que la voix masculine reprenne en disant sèchement :
- Ramasse ça.
Une porte claque et la tranquillité de la nuit s'installe à nouveau. C'est là que la porte-fenêtre s'ouvre, mais Flocon ne me rejoint pas sur le balcon.
Je me lève alors et rentre à nouveau dans sa chambre. Il n'y a plus aucune lumière puisque la lampe se trouve au sol, éparpillée en une dizaine de morceaux. Rose est agenouillée, dos à moi, en train de ramasser les dégâts et c'est en m'approchant d'elle que je remarque le sang qui s'échappe de sa main.
Je ferme les yeux le temps d'un instant, l'instant dont j'ai besoin pour éviter de penser, de réfléchir trop. J'inspire profondément, puis attrape gentiment son bras pour la faire se lever. Elle résiste, mais je la force à se relever, la portant presque et, lorsqu'elle se retrouve face à moi, j'ai à peine le temps de voir la larme qui coule sur sa joue, qu'elle l'efface, comme si elle n'avait jamais existé. Ça fait une éternité que je n'ai pas pleuré. L'envie ne m'a jamais manqué, mais, parfois, on se résigne à se dire que ça ne résoudra rien et que ça n'arrange pas non plus la situation.
Mes yeux tombent sur sa main que j'inspecte d'aussi loin que possible. C'est l'intérieur de sa paume qui a été meurtri et je pense que, malgré le sang abondant qui s'en écoule, sa blessure n'est pas grave.
- Tu vas guérir, lui dis-je doucement pour que son père ne m'entende pas.
- Je sais, je ne suis pas stupide, répond-elle sur la défensive.
Okay, elle est en colère. Je peux le comprendre.
- Met de l'eau et alcool, continué-je.
- Ça aussi je le sais, Einstein !
Je fronce les sourcils, ne comprenant pas où elle veut en venir. Et qu'est-ce que c'est que ce Einstein ?
- Laisse tomber, soupire-t-elle avant de commencer à se pencher pour reprendre sa tâche.
- Laisse. Je suis plus fort.
Je m'agenouille et rassemble les morceaux de verre en un petit tas.
- C'est profondément sexiste ce que tu dis là. Je peux le faire, je ne suis pas faible.
- J'ai pas dit ça. Tu es blessée.
Elle met quelques secondes à me répondre.
- Tu parles mieux, change-t-elle de sujet.
Elle ne me voit pas, mais un petit sourire fait son apparition sur mon visage. Je suis contente qu'elle l'ait remarqué. Je me suis entraîné parce que j'ai horreur d'avoir l'air d'un idiot et, vu qu'elle est si arrogante, je veux pouvoir rétorquer quelque chose d'intelligent.
- Le temps que je rassemble l'argent, il faut que tu te trouves un boulot pour t'insérer dans la civilisation.
- Un quoi ? dis-je alors que je me redresse, ma tâche accomplie.
- Un boulot, un travail quoi.
- J'ai compris, mais comment ? Je ne sais pas… tu vois ?
Un soupir s'échappe de ses lèvres ; j'ai l'impression de l'agacer.
- Je vais t'aider avec ça, mais, en attendant, il faut que tu me promettes d'être vraiment silencieux sur tout ça.
- D'accord.
- Alors nous avons un marché.
Elle me tend sa main valide et je la regarde bizarrement. Pourquoi me tend-t-elle sa main ?
- C'est une sorte de tradition pour dire qu'on a conclu un pacte, ou pour dire bonjour et au revoir, m'explique-t-elle.
- Oh, d'accord.
Je lui serre la main et une petite voix dans ma tête me susurre que je ne suis pas sûr de ce que je conclus vraiment.
CITATION :
Parfois, on vit des choses difficiles que l'on voudrait oublier. Mais c'est tout autour de nous, ça ne nous lâche pas. Le passé est dans un tiroir qui doit rester, au mieux, entre-ouvert. L'ouvrir sans cesse ne le fait pas disparaître, ne nous donne pas de réponses sur l'avenir ; il est seulement le témoin d'un passé compliqué. Il est là pour nous rappeler par quoi nous sommes passés pour en arriver là, pour mieux appréhender demain. Si tu n'es pas prêt, referme-le juste un peu, pour ne pas trop oublier, mais ne le regarde pas trop souvent, il ne construira rien à ta place.
CHAPITRE 7
Ice - Rose
4 jours plus tard...
Il me manque 2 000 euros. Depuis quelques jours, j'ai revendu pas mal de drogue et j'ai réussi à me faire un peu de fric. Mais il va me falloir un peu plus de temps pour que j'arrive à rassembler la somme promise à Oliver.
En parlant du loup, le voici s'en allant dans les bois. Il fait ça toutes les nuits, il s'en va au coucher du soleil et ne revient pas avant le lendemain matin. Il revient lorsque je pars en cours et je ne comprends pas pourquoi il ne profite pas d'un lit tant qu'il en a la possibilité. Ni même de la douche ou de la nourriture. Il a méchamment refusé lorsque je lui ai proposé de lui prendre un appartement en ville. Il ne semble pas prêt à sauter le pas, et quitter sa vie actuelle.
Je me suis longuement remise en question vis-à-vis de ma décision d'avoir fait entrer un étranger chez moi. Car, sous la précipitation, ça me paraissait une bonne idée, puis, en y réfléchissant, c'était plutôt fou comme choix. Je ne pouvais empêcher la petite voix dans ma tête qui me disait que je n'avais pas le droit de laisser cet homme dehors. Ça ne serait pas humain de faire un truc pareil. Il fallait que j'agisse, même si tout ça doit se passer derrière le dos de mes parents. S'ils apprenaient la situation, je suis sûre qu'ils me tueraient. Ils ne comprendraient pas ce qui m'a motivé à l'aider. Je ne suis pas totalement une peste et ils ne l'envisageraient jamais.
Je me pose tellement de questions sur Oliver que, plus curieuse que jamais, j'enfile un manteau avant de courir dans les escaliers et de partir le rejoindre dans la forêt. Je le suis de loin, veillant à ne faire aucun bruit afin qu'il ne me surprenne pas. Je veux vraiment savoir où il se réfugie lorsqu'il part dans les bois.
Oliver marche drôlement vite, je n'arrive pas à le suivre ; il semble être porté par le vent. Comment peut-il aller aussi vite tout en étant aussi discret ? Ses pas sont délicats tandis qu'il avance vers l'inconnu.
Il fait nuit noire et un vent léger vient caresser mes cheveux. La brise calme et cette chaleur lourde laissent penser qu'un orage se prépare. D'ailleurs, quelques gouttes me tombent dans les yeux et glissent sur mon visage. La future tempête n'a pas l'air de gêner Oliver, il garde la même allure et ne regarde jamais derrière lui. Comment peut-il être aussi confiant au beau milieu de la forêt, en pleine nuit ? Moi, je ne fais que balader mon regard sur chaque recoin, ayant peur que, finalement, la légende dise vraie, et que j'ai été assez idiote pour n'en faire qu'à ma tête pour suivre ce fou.
Soudain, je perds la trace d'Oliver.
Je ne vois rien. Mes pas sont brusques et indécis ; je ne sais absolument pas où je me trouve et où il est. Je commence à paniquer. Et si je ne retrouvais plus mon chemin ? Allais-je mourir ici ?
Le ciel grogne alors. Vais-je me faire foudroyer par un éclair ? Une lumière vive illumine la forêt et mon cœur semble s'arrêter. Oh mon dieu, je vais mourir foudroyée là, comme ça.
Et puis, d'instinct, je hurle :
- Oliver !
Je