Inhumain. Ecrivain Anonyme

Inhumain - Ecrivain Anonyme


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point d'eau situé devant la maison attire aussi mon attention. Il y a un petit bassin où l'eau s'écoule en continue dans le grand, et je me demande si l'eau est potable ; s'il y a une possibilité que ce soit de l'eau de source. Comme le ruisseau d'à côté.

      Soudainement, je fronce les sourcils. Quelque chose flotte sur l'eau. Ça ressemble à un matelas, ou à une porte, mais la deuxième option me paraît moins probable que la première. Je m'avance un peu, tout en faisant attention à ne pas me faire remarquer. Une masse de la couleur du feu se détache de la noirceur du matelas.

      C'est la fille aux cheveux rouges.

      Je ne me rappelle plus de son nom. A vrai dire, je ne crois pas l'avoir totalement écouté l'autre jour. J'étais tellement surpris de la voir là, dans mon habitat, dans mon environnement, que je n'ai pas pris soin de me pencher sur son nom.

      Je me rapproche encore et constate qu'elle tient quelque chose dans les mains : un livre. Sa couverture est dans des nuances de bleu, de noir et de blanc, et je me demande ce qu'elle lit. Moi aussi j'aimais ça, avant. Même si je lisais les ouvrages en douce et qu'ils n'étaient, de ce fait, pas à moi. Leur passage entre mes paumes, ainsi que leur odeur me permettaient de tenir lorsque je n'avais plus le courage d'affronter la dure réalité.

      Je ne me suis aperçu des mètres parcourus uniquement lorsque je me suis trouvé au bord de l'eau, en train de dire :

      - Tu lis quoi ?

      Elle ne sursaute même pas, comme si elle s'était attendue à me voir arriver à ses côtés. Des lunettes de soleil lui bouffent la moitié du visage et m'empêchent ainsi de déterminer où son regard se pose. Elle ne semble pas décrocher de son livre lorsqu'elle lance :

      - Ce ne sont pas tes oignons.

      Je soupire parce que cette fille est vraiment exaspérante. Sont-elles toutes comme ça ?

      - Toi flotter sur quoi ?

      Sa tête se tourne vers moi et même si je n'aperçois pas ses yeux, je sens qu'elle me regarde. Tout mon corps me le dit.

      - Tu ne sais pas ce qu'est un matelas gonflable ? T'es sérieux ? Tu viens de quelle planète ?

      Je me sens mal à l'aise. Elle est si détachée, et moi si ignorant que ça me fait diriger mon attention sur les bois, de l'autre côté, le plus loin possible de sa personne.

      Je ne lui réponds pas. Je ne sais pas quoi lui dire, de toute façon. Elle est si… arrogante.

      Elle soupire et se redresse sur son « lit flottant » avant d'enlever ses lunettes. Ses prunelles brillent à la lumière, ils sont d'un bleu/vert si perçant. Le vert cristallin de son œil ressort si puissamment face aux rayons du soleil que je suis légèrement hypnotisé. C'est la deuxième fois que je vois ça. C'est le premier humain que je rencontre à avoir des iris de couleurs différentes. C'est impressionnant et… déroutant.

      - On appelle ça un matelas gonflable. C'est du plastique gonflé à l'air. Ça permet de flotter sur l'eau.

      Surpris, je me tourne vers elle.

      - Depuis quand toi être gentille ?

      Je ne suis pas très doué en langage corporel humain, mais je suis sûr d'une chose, c'est un regard noir qu'elle doit me lancer derrière ses lunettes. Je l'ai contrarié, visiblement.

      - Alors toi, décidément, je ne t'aime pas du tout !

      Je crois que je lui souris et ça me fait tellement bizarre que je m'arrête dès que je sens mes traits se tirer en un rictus.

      Sa presque nudité ne me choque pas plus que ça. Moi-même, je le suis et je me sens bien ; je suis au plus près de la nature comme ça. Ainsi, je n'oublie pas d'où je viens. Elle a une peau blanche qui se rapproche de la neige et elle est si lisse qu'elle ressemble à la légèreté d'un flocon. Elle me rappelle tellement Ice.

      Je remarque quelques tâches sombres au niveau de sa cuisse et de son poignet, mais je ne m'en préoccupe pas. Je suis moi-même couvert de balafres.

      En l'observant encore, je me souviens de la douceur de son visage lorsque mes mains s'étaient portées sur celui-ci et je me demande si le reste de son corps est aussi délicat.

      - J'aime bien que toi être presque nue, dis-je avec sincérité.

      Elle plisse les yeux ; elle n'est pas choquée, seulement méfiante.

      - Tu me dragues là ? Parce que je t'avoue que c'est la première fois qu'on me chauffe comme ça. Tu as la palme de l'originalité, ça, c'est sûr.

      Elle rit. Ça fait bien longtemps que je n'ai pas entendu un rire. Je ne crois même pas en avoir déjà entendu un dans ma vie. Je suis abasourdi par ce son, comme piqué. Je crois qu'elle remarque mon blocage car elle referme son livre d'un coup sec et calme son éclat de joie.

      - Arrête d'être mal à l'aise, je ne le prends pas mal. Je me sens bien dans mon corps, je n'en ai pas honte.

      Pourquoi le couvrir alors ? Pensais-je.

      - C'est pas ça… Je… Moi pas avoir habitude de… contact humain. Moi ne pas être à l'aise avec ça. Ça fait longtemps.

      Elle me regarde pendant un long moment et le bleu/vert de ses yeux brille davantage encore. Je ne sais pas ce qui lui prend à me fixer ainsi, alors je fronce les sourcils et me demande soudainement à quoi elle pense.

      - Aide-moi à sortir du matelas.

      Son bouquin en main et ses lunettes à nouveau sur le nez, elle bouge les bras pour se rapprocher du bord. Je ne cherche pas vraiment à comprendre et m'accroupis avant de lui tendre un bras.

      Je ne sais tout simplement pas pourquoi je l'aide. Sa main touche la mienne et je ne frémis pas autant que je l'aurais cru. Je ne suis pas trop dégoûté par son contact et j'en suis le premier surpris. Je dois être dans un mauvais jour ; un de ces jours où l'on ne contrôle plus ses émotions, son corps et son esprit. Un jour dangereux.

      Je la soulève presque lorsque je la ramène vers moi, et je recule avec rapidité quand je sens son corps se presser involontairement contre le mien.

      - Tu peux m'attendre ici ? J'en ai pour une minute.

      Pourquoi l'attendrais-je ?

      Mais je lui fais signe que oui avec ma tête avant même que je ne m'en rende compte. Cet humain me fait me comporter bizarrement. Cette fille m'horripile, mais je l'écoute ; elle a mon attention et ça m'énerve. Je crois que c'est ma curiosité qui me joue des tours.

      En attendant qu'elle revienne, je plonge la main dans l'eau. Elle est tiède, elle n'est pas comme celle du ruisseau, qui, elle, est affreusement froide et est beaucoup plus dynamique. Comment se fait-il qu'il n'y ait pas de point d'origine à cette forme de source ? Ma tête s'incline dans l'incompréhension.

      Alors que j'allais poursuivre ma réflexion, la fille aux cheveux rouges réapparaît déjà. Elle ne parle pas et n'est pas dans mon champ de vision, mais je la sens derrière moi, alors je me retourne.

      Dans ses bras, il y a des vêtements et je fronce les sourcils.

      - S'il te plaît, met ces vêtements. Je ne sais pas s'ils vont t'aller puisqu'ils sont à mon père, mais c'est mieux que rien, dit-elle en me tendant les affaires.

      - Pourquoi ? Suis bien comme ça.

      Je


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