Storey. Keith Dixon
comme ce programme à la télé, c’était quoi déjà? en jetant un coup d’œil à ses hommes pour qu’ils l’aident, mais n’ayant que des regards vides comme réponse, il reprit: Dragons Den. Tu dois nous vendre quelque chose alors qu’on ne veut rien acheter.
– Je ne vends rien.
– Oh, je crois que oui. Tu vois, je m’intéresse à toi parce que ce que tu dis ne va pas du tout avec ton attitude. Tu as dit à Minty que tu travaillais dans les assurances. Mais tu m’as sauté dessus comme un flic. Sûr de toi, gonflant tes muscles. Je me suis demandé – quels projets as-tu pour cette pauvre fille? À quoi tu joues, hein? À quoi du joues?
Maintenant Araminta s’était levée, rangea son téléphone et lissa le devant de sa robe. Paul remarqua à nouveau à quel point elle était mince aux hanches et à quel point son ventre était plat.
– Ça va David? lui demanda Cliff en lui jetant un coup d’œil.
Elle saisit un sac à main couleur crème du dossier de sa chaise.
– Un peu en pétard contre moi, dit-elle. Ça fait un bon moment que je ne l’ai pas vu.
– Fais en sorte qu’il te désire plus, chérie. Les hommes sont tous pareils, n’est-ce pas? dit-il en se tournant vers Paul. Donnez-nous une main et on vous demandera le bras. On parle du mec de Minty, au cas où tu te poses des questions. Tu vois, tu n’es pas le seul sur la liste des conquêtes.
Paul se leva en repoussant sa chaise et dit à Araminta:
– Je dois aller aux toilettes. Je vais t’accompagner à la porte.
– Bon plan de drague, mais pas besoin. À plus tard!
Elle passa devant lui sans le regarder. Il sentit brièvement son parfum. Il se retourna pour la suivre du regard se faufiler entre les tables où des hommes accompagnés de leurs femmes et copines firent une pause pour la regarder, avant de jeter un coup d’œil dans sa direction.
– Minty, dit-il en lui saisissant le bras.
– Retire tes sales pattes, lui dit-elle en se retournant le regard obscur.
Il la lâcha.
– Qu’est-ce qui se passe? Qu’est-ce tu fais avec ce tas de tocards?
– C’n’est pas tes oignons, en adoucissant légèrement le regard. Je suis désolée, mais ils étaient ici quand tu n’arrives.
– Qu’est-ce qu’il veut? Pourquoi il te tourne autour?
– Probablement pour les mêmes raisons que toi, lui dit-elle en le fixant du regard.
Puis elle se tourna et partit. Paul la regarda sortir dans l’air froid, hocha la tête et se dirigea vers les toilettes. Il pensait qu’il s’était enchevêtré dans un film dont l’intrigue était incompréhensible et dans lequel les personnages étaient incohérents.
Plus tard, il réalisera que c’était là la raison pour laquelle il aurait dû continuer à marcher, s’enfuir le plus loin possible de ce pub.
Tarzan et Gary entrèrent pendant qu’il remontait sa braguette. Le grand homme, plus grand que prévu, se pencha sous la cadre de la porte avant de la fermer et de s’adosser dessus. Gary jeta un coup d’œil dans toute la pièce carrelée en sifflant et vérifiant les différents compartiments.
Paul se rinçât les mains à l’eau et saisit une serviette en papier, se demandant ce qu’ils allaient bien faire. Rien de grave, pas dans un pub bondé. Probablement qu’ils voulaient juste discuter pour voir s’il était un menteur. Il avait lui-même l’habitude de le faire, lorsqu’il était plus jeune, pour apprendre les ficelles du métier.
– Lui Tarzan, toi Jane? dit-il à Gary.
– Tu vois, qu’est-ce que je t’ai dit? dit Gary en se retournant vers Tarzan, avant de pointer un doigt vers Paul.
– Ta gueule te foutra dans la merde, tu sais? Tu ne peux pas t’en empêcher. On en parlait, Tarzan et moi, on s’est dit que ta gueule te foutra dans la merde un jour. C’est ça, Tarzan?
Tarzan hocha la tête en croisant les bras pour insister, son courage lent presque endormi. Paul pensait qu’il était fort, mais n’avait aucune subtilité. Il serait donc facile à neutraliser tant qu’il était hors de sa portée.
Gary était plus petit que Paul, maigre à la peau grise et les yeux constamment en mouvement derrière les lunettes. Il n’était pas un soutien de confiance, il était préférable de l’avoir toujours à l’œil.
– Cet endroit pue. Est-ce qu’on peut discuter ailleurs? dit Paul.
– On n’est pas là pour discuter, dit Gary. C’est… comment on dit, une leçon.
– De quoi?
– De comment les choses fonctionnent. Entre nous et toi. Si tu tournes autour de Minty, il y a des règles à respecter.
– Et un règlement, dit Tarzan.
– Vous me dites que j’ai besoin de votre permission pour parler à quelqu’un? Vous pensez que je vais me laisser faire? Je ne l’apprécie pas autant que cela. Je n’aime pas les blondes.
Gary se mit à rire et se retourna vers Tarzan.
– Pas de soucis, elle n’est pas vraiment blonde, n’est-ce pas?
– Pas vraiment, répondit Tarzan. Pas en bas, en faisant rire à nouveau Gary.
– C’est bon maintenant? dit Paul.
– Non, dit Gary, nous n’avons pas fini. Tu travailles pour qui?
– Que veux-tu dire?
– Tu travailles dans les assurances. C’est quoi le nom de la compagnie?
Paul croisa le regard de Gary et le fixa.
– Ça ne te regarde pas, dit-il.
– Ouais, je savais que tu dirais ça. Mais le problème, c’est que Cliff veut savoir si tu es bien la personne que tu prétends être.
– Ou quoi?
– J’ne sais pas, il ne l’a pas précisé.
– Quelle différence cela peut-il faire? La compagnie pour laquelle je travaille se trouve à Londres.
– Donc il n’y a aucun mal à ce que tu nous le dises, non? se tournant sur le côté en lançant un regard arrogant vers Paul. Le problème est que je pense qu’il a prévu quelque chose pour toi.
– La réponse est non.
– Ouais, on savait que tu dirais aussi ça. C’est pourquoi nous avons une motivation pour toi.
Lorsqu’ils le firent ressortir dans le bar, Cliff était au téléphone. Il les arrêta en levant une main avant qu’ils s’assoient. Gary agrippa le bras de Paul et le lâcha en le secouant. Mais il resta debout jusqu’à ce que Cliff eût fini en pointant son index sur le bouton Raccrocher et l’enfonça.
Maintenant Paul écoutait Gary raconter à Cliff ce qui s’était passé dans les toilettes: Paul avait refusé de dire pour qui il travaillait et n’était pas intéressé par ce que Cliff avait prévu pour lui. Cliff hochait la tête en écoutant, la bouche en cul-de-poule pour montrer qu’il prenait le sujet au sérieux. Puis il pointa du doigt la chaise sur laquelle Paul était assis auparavant. Tarzan le saisit par les épaules et le poussa.
Paul se demandait ce que les autres gens dans le bar pensaient de ce manège – peut-être qu’ils n’avaient pas remarqué ou qu’ils étaient habitués à Cliff et à ses hommes, et qu’ils s’en foutaient. Peut-être que c’était le genre de pub où c’était normal que des bouteilles soient cassées et des menaces soient faites.
Paul n’avait aucun problème avec ça. Il avait vécu pendant un temps au sud de la rivière à Londres et avait rencontré des personnes avec qui vous n’aimeriez pas avoir d’embrouilles.