Storey. Keith Dixon

Storey - Keith Dixon


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cela à cette époque, il prit trois semaines de congé-maladie dû à un tympan abîmé, dont les séquelles n’avaient pas encore entièrement disparues.

      – Tu ne travailles pas dans les assurances, dit Cliff. Je le sais. Mais je ne sais pas ce que tu fais. Regarde-toi, assis-là à me lancer ce regard et à te demander de quoi il s’agit.

      – Je sais ce qui se passe.

      – Ah bon? Alors dis-moi un peu. Je te donnerai une note sur dix.

      – Toi et ta bande vous vous ennuyez. Vous ne gagnez pas d’argent – ou très peu – et vous pensez que vous devriez vous en prendre à quelqu’un, une personne pour vous divertir. Tu penses que j’essaye de me faire Araminta, tu crois donc avoir une certaine emprise sur moi. Que je ferai ce que tu veux, seulement pour que je glande ici comme les Funboy Three.

      – C’est intéressant: mon père connaissait le père de Terry Hall dans les années soixante, tu sais? Je n’ l’ai jamais rencontré en personne. Mais je te donne huit sur dix, pas mal pour un débutant.

      – J’ai loupé les orgies d’ivrognes et les tentatives de suicide, c’est ça?

      – On peut dire que c’était marrant. J’ai failli mourir une fois. Accident de voiture. Un idiot a dépassé la ligne blanche et a foncé sur moi, sur l’autoroute Sewell, juste après le pub Devon, tu connais? J’ai eu plusieurs os de cassés et le foie endommagé, mais à part ça, je m’en suis bien sorti. J’ai mal à la tête de temps en temps. Bref, quand j’étais allongé, tout écrasé dans la voiture, je croyais que j’allais mourir. Je me demandais si l’ambulance arriverait à temps ou si j’allais m’endormir. J’n’avais pas mal, j’étais sûrement en état de choc. Mais depuis, je me suis intéressé à la mort, comment c’est lorsqu’on part. Est-ce que ça fait mal, tu t’accroches ou est-ce que c’est tout juste comme aller au lit et tu ne sens rien? Le résultat est que je n’ai plus peur de la mort. Je n’veux pas mourir, mais je prendrai des risques. J’avais l’habitude d’être une grande gueule avec certains tolards quand j’étais en tôle, les provoquer pour voir jusqu’où je pouvais les pousser pour qu’ils m’attaquent. Ils ne l’ont jamais fait. Ils se sont sûrement rendu compte que je n’avais pas peur d’eux, ils m’ont alors foutu la paix.

      – Tu es un causeur intéressant.

      – J’ai mes moments. Bref, ma question, mec, est-ce que tu es intéressé à te faire un peu de blé. Un peu d’oseille sup.

      On y est, pensa Paul. Toute l’histoire était que Cliff se prenait au jeu pour tâter le terrain avant de s’engager.

      – Tu ne dis rien, dit Cliff. Aucun son n’est sorti de ta gueule. Je ne suis pas télépathe, tu sais? Alors qu’est-ce t’en dit?

      – Que veux-tu que je te dise? dit-il pour raccourcir la discussion et faire en sorte que ce soit Cliff qui fasse le travail.

      – Tu n’auras rien à faire. Mettre en pratique ton jugement professionnel. Jeter un coup d’œil à quelque chose et donner ton opinion. L’opinion d’un agent d’assurances.

      – Si je suis bien un agent d’assurances.

      – Nous y voilà. Ce sera une sorte de test, alors?

      – Est-ce que je serais payé?

      – Je t’ai déjà dit que oui, non? Le montant sera fixé plus tard.

      Paul jeta un coup d’œil à Tarzan et Gary, qui le fixaient de leurs yeux de mort-vivants. Il réalisa que Dutch avait disparu depuis qu’il était sorti des toilettes – il ne lui manquait pas.

      Cliff saisit son téléphone.

      – Je suppose que ton silence est un oui. Maintenant tu peux te casser. J’ai des choses à faire.

      L’attention dans la pièce avait brusquement changé, comme si Paul n’était plus là. Tarzan et Gary se mirent à parler ensemble et Cliff lisait les messages sur son téléphone, ses yeux les parcourant à la vitesse d’un bookmaker évaluant des probabilités.

      Paul se leva et sortit, se demandant s’ils remarqueraient son départ.

      CHAPITRE CINQ

      Elle avait mangé une banane et entamait un kiwi, lorsque Cliff appela, le ton énervé comme d’habitude, sa voix devenant perçante et exigeante en demandant combien de temps elle allait faire traîner les choses avec David avant d’avoir un résultat.

      Quand Janice était plus jeune, elle démissionnait dès qu’une personne haussait le ton avec elle – c’était une chose qu’elle ne pouvait pas supporter. Elle supportait cela assez venant de la part de son père à la maison. Il était un tyran pour les gars locaux à Dalkeith, travaillant sur des chantiers ayant toujours une pelle à manche court à la main. Il l’apportait avec lui à la maison et menaçait avec, sa mère et ses trois sœurs en l’agitant dès le premier signe d’embrouilles.

      Un matin, une fougueuse de dix-sept ans ne voulant plus se laisser faire, se leva très tôt, appela un taxi, prit la pelle de la cour arrière et la brûla. Le temps que son père arrive en bas de l’escalier en tee-shirt et shorts, elle avait déjà claqué la porte d’entrée et dit au chauffeur de taxi de l’emmener à la Station Waverley à Edinburgh, où elle s’acheta un billet simple pour Londres, se demandant ce qu’elle allait faire des sept cents livres qu’elle avait économisés en travaillant dans la boulangerie Greggs deux jours par semaine, en plus des deux cents livres qu’elle avait volés de la boîte à thé où son père gardait l’argent pour ses boissons.

      Elle logea chez sa tante Glinnie pendant deux semaines jusqu’à ce qu’elle ait trouvé un emploi dans un bureau d’avocat à Twickenham. Puis elle loua un appartement au-dessus d’une compagnie d’assurances tout en élaborant un plan. L’avocat réussissait bien et voulait quelqu’un d’habile pour travailler à la réception. Comme tout le monde, elle tapait bien car elle utilisait l’ordinateur depuis l’école, et il lui a fallu peu d’efforts pour embobiner l’homme âgé.

      Elle savait qu’elle était intelligente et ça ne la gênait pas de mentir. Alors qu’elle accueillait les clients et tapait les testaments la journée, elle s’était mise à travailler en ligne la nuit – les escroqueries internet venait d’être lancées à l’époque – en utilisant des faux noms et des photos truquées sur des sites de rencontre, prétendant tomber amoureuse d’une foule de mecs d’âge moyen via email et de convenir sur des rendez-vous pour les rencontrer… à condition de recevoir en premier les frais du voyage.

      Plus tard, elle acheta une liste d’emails sur un CD d’un lithuanien dans un club et envoya des milliers d’emails offrant un paiement aux personnes souhaitant travailler à domicile, en traitant des réclamations d’assurances. Il suffisait tout simplement d’envoyer un chèque pour couvrir les frais du bidule à rayon laser qui vérifiera le numéro de réclamation et une rémunération sera offerte pour cent réclamations traitées. Les chèques étaient envoyés à une boîte postale, d’où elle les collectait deux fois par semaine et les déposait dans un compte sous un faux nom.

      Depuis, elle avait appris comment créer des sites Web rudimentaires en utilisant Dreamweaver. Elle créa Naturograin.com, en utilisant des images de suppléments de vitamines qu’elle trouvait en ligne et offrait un produit anti-cancer incroyable à un prix défiant toute concurrence si acheté dans l’heure qui suit. L’argent se mit à déferler du monde entier. Elle déménagea de son appartement d’une pièce pour un appartement plus spacieux, elle renouvela sa garde-robe et acheta sa première voiture, une Coccinelle jaune.

      Après quelques années, elle laissa tomber l’avocat et dirigea une demi-douzaine de sites Web de vente de faux produits en réfléchissant à ce qu’elle pourrait faire ensuite.

      Jusqu’à ce qu’on l’informe que les flics commençaient à s’y intéresser.

      Elle avait toujours eu de la chance. Un soir, elle rencontra Robbie, un flic intéressant mais également un blaireau, travaillant pour une nouvelle division


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